L’avocat général de la CJUE conclut que le SJI est conforme au droit européen, en attente de l’avis définitif de la Cour

Le 29 janvier 2019, l’avocat général de la CJUE, Yves Bot, a émis un avis non contraignant, estimant que le système juridictionnel des investissements (SJI) inclut dans l’AECG Canada-UE était compatible avec le droit européen. Bot a évalué le SJI au regard du Traité sur l’Union européenne, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), et de la Charte européenne des droits fondamentaux.

L’Avocat général a rendu son avis après que la Belgique ait demandé à la plus haute juridiction de l’Union de donner son avis sur la compatibilité du SJI avec le droit européen. La Belgique avait formulé cette demande le 7 septembre 2017, quelques semaines à peine avant le début de l’application provisoire de l’AECG au Canada et en Europe. La question du RDIE, par le biais du SJI ou d’un autre mécanisme, fait particulièrement débat en Belgique où la région wallonne a pu retarder la signature de l’AECG au titre de plusieurs préoccupations quant à la mouture originale, entrainant au final de plus amples négociations et l’adoption d’un instrument interprétatif conjoint.

Dans son avis, Bot considère que le mécanisme de SJI « ne porte pas atteinte à l’autonomie du droit de l’Union et […] n’affecte pas le principe de la compétence exclusive de la Cour dans l’interprétation définitive du droit de l’Union ». Bot affirme également que les sauvegardes incluses dans le SJI permettent un accès suffisant à un tribunal indépendant et impartial, qui était l’une des préoccupations de la Belgique.

Bot formule plusieurs observations quant à la manière dont l’AECG fixe la compétence du tribunal envisagé, notant que cette dernière est « étroitement délimitée » et « lié[e] par l’interprétation » donnée par la Cour. Il formule également d’autres conclusions quant aux relations entre le tribunal et les systèmes juridiques européens à l’échelon de l’Union et à l’échelon des États membres. Par exemple, il indique que l’instrument interprétatif conjoint négocié entre l’UE et le Canada encourage les investisseurs à « épuise[r] [l]es voies de recours internes » avant de saisir le SJI.

Bot affirme en outre qu’au titre de l’AECG, il n’y a « aucune dénaturation des compétences que les traités confèrent aux institutions de l’Union et aux États membres ». L’Avocat général considère que tel qu’il est formulé, l’AECG « ne méconnai[t] pas le principe général d’égalité de traitement » s’agissant de l’accès au mécanisme de règlement des différends.

La CJUE n’a pas encore rendu son avis définitif sur le SJI contenu dans l’AECG, qui sera contraignant, même si la date de celui-ci n’a pas encore été confirmée. Le SJI, ainsi que les dispositions relatives à la protection de l’investissement et à l’accès au marché des investissements de portefeuille, ne sont pas encore appliqués au titre de l’AECG. Ils le seront après la ratification de l’AECG par les parlements des États membres de l’Union.

Dans le cadre des futures négociations avec des États non membres de l’Union, la Commission européenne a décidé d’aborder les questions du commerce et de l’investissement dans des accords distincts, compte tenu des difficultés juridiques rencontrées dans la ratification des accords regroupant ces deux questions. Ce changement d’approche a été approuvé par le Conseil européen en mai 2018.